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Coaching cognitif et comportemental

Par Michael Pichat, le 27/03/2014

 

Une pratique résolument opérationnelle d’accompagnement professionnel.

Largement implanté dans les pays anglo-saxons dont il est originaire, le coaching cognitif et comportemental se développe en France. A l’opposé d’une démarche existentielle visant à « sur-psychologiser » les problématiques et enjeux du collaborateur ou du manager accompagné, l’approche cognitive et comportementale se caractérise par les deux maîtres-mots suivants : mettre en action et lever les freins à cette action.

Qu’est-ce que le « comportemental » et quelle est sa place dans le coaching ?

Le registre comportemental est celui de l’action, de l’opérationnel et de l’efficience (ce qui ne signifie pas pour autant rentabilité et productivité à tout prix). Cette dimension est nécessairement centrale dans le cadre d’un accompagnement de coaching professionnel, dans la mesure où les organisations expriment toujours de fortes attentes à ce niveau.

Le coaching, dans sa dimension comportementale, se traduit par la définition et la co-construction des éléments suivants :

  • Quelle est la finalité générale et concrète de l’accompagnement de coaching ? Cette finalité peut, à titre d’exemple, être : « parvenir à occuper pleinement mon poste de chef de service », «  définir le meilleur positionnement permettant à mon projet d'être viable », « mettre en place un meilleur rapport avec ma hiérarchie ».

  • Quel est mon plan d’action ? Plan d’action qui sera construit en divisant la finalité générale retenue précédemment en une série de grands buts à atteindre, que l’on nomme les « objectifs généraux ». Pour un coaché dont la finalité est « occuper pleinement mes attributions de manager auprès des partenaires ainsi que des membres de mon équipe », ces trois objectifs généraux suivants pourront, par exemple, être retenus : (1) « recadrer les structures partenaires lorsque c’est nécessaire », (2) « mieux encadrer au quotidien mon équipe », (3) « stimuler la créativité de mon équipe pour créer de nouvelles offres de prestations ».

  • Comment vais-je concrètement mettre en œuvre les objectifs généraux retenus ? Autrement dit, quelles sont les actions tangibles que je vais mettre en place, ici et maintenant, afin d’atteindre chacun de ces objectifs généraux ? Chaque objectif général va ainsi être, à son tour, divisé en « objectifs spécifiques », actions précises et localisées que le coaché décide d’engager. Ainsi, à l’objectif général « améliorer la planification de l’activité de mes collaborateurs » (le « quoi ? »), pourront être associés les objectifs spécifiques (les « comment ? ») suivants : (1) « lister les principales activités actuelles de mes collaborateurs », (2) « actualiser cette liste le premier lundi de chaque mois », (3) « analyser chaque vendredi après-midi les avancées de mes collaborateurs vis-à-vis des activités actuelles et à venir ».

 

Qu’est-ce que le « cognitif » et quelle est sa place dans le coaching ?

Le registre cognitif est celui des perceptions, des modes de raisonnement (biais cognitifs, matrices cognitives), des croyances et des interprétations ; autrement dit, le registre de la pensée. Le cognitif est ainsi ce qui va générer les actions, les attitudes, les conduites, c’est-à-dire le registre comportemental.

Les techniques de coaching cognitif interviennent afin de faire évoluer les croyances limitantes qui vont se révéler être des obstacles à l’atteinte des objectifs précédemment définis. Ces croyances sont des « micro-théories » que le coaché a fabriqué sur :

  • Lui-même : ce qu’il pense qu’il est, qu’il n’est pas ou qu’il devrait (absolument) être / avoir / obtenir / devenir / faire / accomplir / montrer / ressentir.

  • Autrui : ce qu’il pense que les autres sont, ne sont pas ou devraient (absolument) être / faire.

  • Le monde / son entreprise / son environnement : ce que le coaché pense qu’ils sont, ne sont pas ou devrait (absolument) être, la façon dont ils fonctionnent ou devraient fonctionner, ce qui les caractérise, etc.

Afin de déstabiliser et de remplacer ces visions problématiques par des versions plus aidantes, les techniques cognitives vont s’attacher à montrer qu’elles sont fausses, non confirmées par les faits et contre-productives. En effet, ces visions initiales ont pour caractéristique de s’opposer à la mise en œuvre du plan d’action visé par le coaching, il est des lors nécessaire de les faire évoluer.

Quelles sont les applications du coaching cognitif et comportemental ?

Les domaines d’application du coaching cognitif et comportemental sont divers. A l’image de la variété des problématiques et enjeux auxquels se retrouvent confrontés les collaborateurs et managers accompagnés au sein des organisations :

La difficulté à gérer son temps, pouvant se traduire par une course perpétuelle, des retards fréquents, un enlisement dans les détails, une faible productivité, une perpétuelle vacillation entre différentes alternatives ou encore un problème de délégation. Les croyances contre-productives qui seront alors identifiées (puis déstabilisées) chez le coaché pourront, à titre d’exemple, figurer parmi les suivantes : « ce que je fais doit être à 100% parfait », « je dois faire des choses qui ne relèvent pas de mes attributions afin d’éviter les tensions », « si je veux que le travail soit bien fait alors je dois le faire moi-même ».

L’émergence d’une quantité significative de stress et la difficulté à y faire face. Les croyances limitantes pouvant être impliquées sont régulièrement de la forme : « il faut impérativement que je m’acquitte de toutes mes tâches dans la durée impartie », « je ne peux pas dire non », « il ne m’est pas possible de demander de l’aide », « les autres doivent toujours apprécier ce que je fais ».

Les problématiques d’assertivité, difficultés à faire valoir son point de vue, sans pour autant l’imposer systématiquement aux autres. L’analyse des modes de pensée du collaborateur accompagné débouche alors, par exemple, sur des visions stéréotypées du type : « il ne faut jamais que je commette d’erreurs », « mes besoins sont moins importants que ceux des autres », « il n’est pas une bonne chose que j’exprime mes ressentis ».

La gestion des conflits et des critiques. Les croyances irréalistes en jeu peuvent se révéler être : « mes relations avec les autres devraient être toujours simples », « ce n’est pas normal que les autres ne pensent pas comme moi », « les autres sont injustes et ne pensent qu’à eux ».

La difficulté à changer, lorsque les évolutions de l’environnement appellent pourtant des modifications de ses modes de fonctionnement : « il est anormal que les choses changent », « si je change, je ne serai plus moi », « je suis né ainsi et je ne peux pas changer », « je suis trop vieux pour changer ».

Les problématiques de maîtrise du risque, de prise de décision et d’arbitrage. Les croyances pouvant alors émerger sont : « je ne dois pas prendre de risque », « je dois toujours être à 100% certain que je prends la bonne décision », « je dois me sentir bien lorsque je prends une décision », « les autres doivent toujours comprendre et valider mes choix ».

Comment développer ses capacités d’analyse des situations ?

Parce que l’action est essentiellement le fruit de l’analyse des situations, le coaching cognitif et comportemental s’attache également à travailler les biais cognitifs du coaché. Ces erreurs de raisonnement formatent une mauvaise perception, interprétation mais également une mauvaise exploitation des situations et des informations auxquelles le coaché est confronté. Ces modes de raisonnement problématiques sont par la suite sources de conduites inefficaces voire contre-productives.

Pour améliorer ces modes de raisonnement non aidants, le coaching cognitif et comportemental pourra s’attacher a développer les matrices cognitives du coaché, afin de lui permettre un meilleur ajustement à son environnement. Ces principales matrices sont :

  • L’amplitude, capacité à prendre en compte les différents aspects d’une situation ou d’une personne; afin de ne pas émettre de conclusions réductrices et simplistes à leur endroit.

  • La lucidité, aptitude à regarder avec « sang froid » et factualité une situation ou une personne ; afin de ne pas émettre de conclusion (uniquement) « affective » les concernant.

  • La décentration, compétence à se coordonner au « monde extérieur » (Autrui, faits) et à se remettre en cause ; afin d’adapter ses modes de fonctionnement lorsque nécessaire.

  • L’innovation, capacité à créer de nouveaux regards sur les situations ou les personnes ; afin de ne pas faire que reproduire ceux habituellement mobilisés (par soi-même ou son environnement).

  • L’autonomie, aptitude à identifier et à se libérer des contraintes, des influences voire des manipulations issues d’Autrui ; afin de ne pas perpétuer des conduites non souhaitées et contre- productives.

Michael Pichat, docteur en psychologie, est maître de conférences des universités et coach. Il dirige le cabinet Chrysippe, organisme de R&D en sciences humaines et sociales . Il est l’auteur du Manuel de coaching cognitif et comportemental (InterEditions).
Coline Delavelle est étudiante en psychologie

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